Histoire

on commence par un bon site sur ce bourg:

POULAINES

 

Le Berry: Ancien pays des Bituriges Cubi. Il fut intégré à la province d'Aquitaine après la conquête Romaine.Indépendant au Xème siécle, il fut ravagé, lui aussi par le Prince noir durant la guerre de cent ans. il devint ensuite la propriété de Jean Ier du Berry et sera rattaché à la couronne au XVIème siécle.

Poulaines: il reste des vestiges de l'abbaye de Barzelle construite aux XII et XIIIème siécle. l'église saint Saturnin date des XII, XV et XVIIème siécles. des objets en bois sculptés provenant de l'abbaye de Barzelle et de la Vernusse y sont entreposés.

Abbaye de Barzelle: en 1137, Renaud de Bigre fit don sur son lit de mort d'une vaste prairie pour bâtir un monastére au moine Hugues. Les ressources étaient faibles et le premier abbé qui se nommait Foucher s'en ouvrit au roi Louis VII:"Nous n'avons que Dieu pour ouvrier". il n'eut pas d'aide et il fallut 82 ans pour achevé l'édifice.

barzelle

quelques personnages dont il faudrait que je creuse l'histoire:

l'abbé Eugéne Pierre Duroisel. a publié une monographie de la commune:"La seigneurie de Poulaines"

Jean du Chévre

Sieur de Rymbé

 

Messire de Boisvilliers

Florimond du Puy

Pierre Pépin, sieur de la Thibaudière

Renaud le Bigre

Extrait de "Nouvelle histoire du Berry"Par M.Pallet

 " Famille du Verdier:  cette famille a tiré son nom du fief et seigneurie du Verdier, fis en la paroisse de Poulaines, mouvant de la Baronie de Graçay, qu'elle a possédée pendant plusieurs siècles, ainsi que les seigneuries de Niherne et de la Chapelle Ortemale, en effet, nous apprenons du Chartulaire de Massay, que Girard du Verdier, Damoiseau, donna à l'abbé et religieux de Massay seize deniers de cens au village de Sarmaises, l'an 1247. Par le Chartulaire de l'archevêché, il paroît qu'en 1262, entre les gentilshomme du diocèse de Bourges qui firent le serment à l'archevêque sur le fait de la trêve et de la commune, Robert de Verdier, chevalier, le prêta avec M.Renulphe, sire de Culan, et Robert de saint Germain, chevalier: juraverunt communiam & treugam dominus Renulphus de Culento, Robertus de Viridario &  Robertus de sancto Germano, milites. Comme nous n'avons pas la preuve certaine de filiations, nous commencerons la généalogie par Guillaume."...

    Guillaume du Verdier, écuyer, seigneur de Niherne et du Verdier.

son fils: Hémeri du Verdier, écuyer, seigneur de Niherne et du Verdier, qui vivait l'an 1375.

son fils: Charles du Verdier, écuyer, seigneur de Niherne et du Verdier. Il épousa, le 24 février 1447, Marguerite de la Châtre. Il fit la foi et Hommage du fief du Verdier. aux Barons de Graçay, le 18 décembre 1450. apparemment c'est le dernier a être seigneur du Verdier. sa descendance reste cependant seigneur de Niherne.

 

Marguerite Chauvelin et Louis de la Pivardière (né le 15 novembre 1661):  tiré de:"Sauf conduit du roi accordé à Louis de la Pivardière....le 26 août 1698." 

Factum servant de requeste, contenant demande en réparation d'honneur de la Dame de la Pivardière.

" A nos seigneur de parlement en la chambre de la Tournelle. Supplie humblement Marguerite Chauvelin, dame épouse de Louis de la Pivardière, écuyer, sieur de Boucher: disante qu'encore que le château de Nerbonne, dans lequel elle demeure, ne soit point dans le ressort du présidial de Châtillon, et que la justice de nerbonne releve en premier instance de Lucé, et par appel à Saint Aignan, et de saint Aignan à Blois, néanmoins maistre Jean Bonnet, Lieutenant particulier à Châtillon, s'est avisé le cinq septembre dernier de se faire rendre plainte par maître François Morin, procureur du roy audit lieu, de deux faits également calomnieux. Le premier est de ce que ledit Morin a dit avoir appris par le bruit commun, que la mauvaise conduite de la suppliante avait fait absenter ledit sieur de la Pivardière. et le second est, de ce que ledit sieur de la Pivardière étant venu le quinze août dernier audit château de Nerbonne, elle l'avait tué ou fait tué la nuit du quinze au seize août dernier audit lieu de Nerbonne, et que sa reste avait été trouvée dans des bois taillis, prés ledit lieu de Nerbonne. En conséquence de cette plainte , ledit Bonnet s'est transporté sur les lieux le six septembre et jours suivans, et a oüy plusieurs témoins qui n'ont parlé de ce supposé assassinat que par des oüy dire, et n'ont nullement parlé de la supposée mauvaises conduite énoncée en la plainte. Le sept dudit mois, il a sur ces oüy dire, décrété prise de corps contre la suppliante et contre deux petits enfans qu'elle a, l'un agé de quatre ans, et l'autre de neuf, et contre les domestiques de la suppliante, et les seize et vingt neuf dudit mois de septembre, lesdits Morin et Bonnet ont en vertu de leur décret, envoyé un grand nombre de sergens et archers, par lesquels ils ont fait enlever tous les meubles et effets qui étaient dans ledit château de Nerbonne, ce qui obligea la suppliante de leur faire signifier le vingtième septembre qu'elle était appellante comme de juge incompétant, de cette procédure extraordinaire, et qu'elle les prenait à partie en leurs propres et privez noms, attendu même que le crime dont ils l'accusaient était supposé, et le vingt quatre dudit mois de septembre elle obtint arret de la court, par lequel elle fut reçue appellante comme de juge incompétant de ladite procédure extraordinaire, et permis à elle de prendre lesdits Bonnet et Morin à partie, sur lequel appel...(..)"

le sieur de la Pivardière aurait été vu au Bourdieux, à Châteauroux et à Issoudun les 16, 17 et 19 août. il s'agirait d'un complot pour dévaliser le château. Bonnet et Morin aurait fait ce retracter un temoin: Catherine Lemoine, une servante de la suppliante. après deux interrogatoires en faveur de la suppliante elle finit sous la contrainte à dire avoir vu le sieur de la Pivardière mort le 15 août dans une chambre du château. elle fut suivit par une deuxième servante: Marguerite Mercier. quant à Luquette Risé, la troisième servante elle nie. malgré tout, je pense (difficile de comprendre le texte) que Bonnet fut désaisi de l'affaire et que c'est Sieur Vicegerant de Bourges qui prit la suite. un sieur Charrost est mis en accusation( c'est un ennemi de Bonnet depuis longtemps)malgré le fait que le sieur de la Pivardière est vu à Auxerre (entr'autre) la suppliante est toujours condamnée. le sieur de la Pivardière se fait même reconnaître ...mais rien ni fait. Bonnet, Morin et Vicegerant restent sur leur position. ils continuent de calomnier la suppliante (adultère) toujours sans preuve. mais la vérité finit par éclater et ...

"(...) Ce considere, Nosseigneurs, il vous plaise en premier lieu, recevoir la suppliante partie intervenante en la cause d'appel comme abus entre ledit Charrost d'une part, et les Official, Vicegerant et Promoteur de Bourges d'autre; Faisant droit sur l'intervention, dire que la procédure de l'officialité, en ce qui concerne la suppliante sera oté et rayé desdites procédures; et pour l'y avoir nommée, les condamner à luy en faire réparation d'honneur, avec dommages, interêts et dépens, esquels ils seront condamnéz solidairement.

Et en deuxième lieu, en qdjugeant à la suppliante les conclusions de sa requête du ....juin dernier, ordonner que Bonnet et Morin pris à partie, seront tenus de faire faire à leurs frais, suivant l'ordonnance, la nouvelle instruction de l'accusation dont il s'agit, devant les juges où elle sera renvoyées, dans six semaines; et à cet effet y resteront partie, pour y prendre contre eux telles conclusions qu'elle avisera, en cas que par l'arrêt qui interviendra, elle ne soit pas dés à présent envoyée absoute, comme son mary l'a requis, et les condamner aux dépens des causes d'appel et prise à partie: et vous ferez bien. signez, Marguerite Chauvelin, et Labruere; et plus bas est écrit, viennent les parties au premier jour en la chambre de la Tournelle. fait en parlement le troisisème juillet mil six cent quatrevingt dix huit.

                                                                                       LABRUERE, procureur.(...)"

"(..)Condamner Morin et Bonnet, la dame de Lucé et ses Officiers, à rendre les meubles, bestiaux, foings et pailles, et autres effets par eux saisis et enleves, estant dans le château de Nerbonne, métairie et lieux en dépendant, en vertu de leurs decrets, par le moyen dequoy les terres, vignes et prés, sont restés en friche, en quinze mil livres de dommages, et interêts, et en tous les dépens solidairement. Comme aussi condamner ledits officiers de l'officialité, en trois mil livres de dommages et interêts, et aux dépens, à leurs égard aussi solidairement.

                                                                                       LABRUERE, procureur.(...)"

ce qui aurait forcé sieur de la Pivardière à disparaitre. peut -être sa bigamie.

"(...)Quand à la première objection, qui est qu'il se justifie qu'en 1695. La Pivardière qui est homme de guerre, s'est épris d'amour avec lea fille de la veuve Pillard cabaretière à Auxerre, qu'il a épousée, et comme il ne peut avoir fait ce second mariage, qu'en se servant de faux certificats, et que le crime de bigamie est punissable, aussi bien que de s'être servy de faux certificats.(...)".

 

autre livre: "répertoire general des causes célébres anciennes et modernes". de saint Edme

 "Louis de la Pivardière, gentilhomme dont la noblesse était fort ancienne, mais la fortune trés médiocre, reçut le jour en Touraine. La succession de son père, partagée entre trois frères dont il était le cadet, lui donnait à peine de quoi subsister avec honneur dans sa province. Afin de se distingue de ses deux frères, il joignit au nom de la Pivardière, qui leur était commun à tous les trois, celui de du Bouchet.

La pivardière avait la taille médiocre, une physionomie assez ordinaire, quelque peu d'esprit, un assez bon caractère et un goût trés vif pour les plaisirs.

Il crut devoir chercher dans le mariage un supplément à sa fortune. A cet effet il jeta les yeux sur Marguerite de Chauvelin, fille de François Chauvelin, chevalier et seigneur de Nerbonne, dans le Berri. Elle était veuve de Charles Menou de Billi, gentilhomme d'une maison aussi distinguée par son ancienneté que par ses services. Elle avait eu cinq enfants de  son premier mariage, quatre garçons et une fille; celle-ci épousa en 1668, Charles Philippe Séguier, seigneur du Plessis.

Tout le bien de la veuve Menou consistait dans la terre de Nerbonne qu'elle avait recueillie de la succession de son père et dont le revenu ne s'élevait pas au-delà de mille livres. Du reste, elle avait les traits du visage peu réguliers, et elle était agée de trente cinq ans; mais son air était agréable et son maintien honnête. Elle aimait la société et recevait avec une grâce parfaite. L'humeur de la Pivardière lui plut; elle l'épousa sur la fin de l'année 1687.

Devenu par cette union seigneur de Nerbonne, de la Pivardière fut obligé de servir en cette qualité dans l'arrière-ban convoqué en 1689. Il obtint en 1692 une lieutenance dans le régiment de dragons de Sainte Hermine. Pendant les fréquentes absences qu'il était obligé de faire pour suivre son régiment, soit à l'armée, soit dans les places frontières, il écrivait de temps en temps à sa femme et venait quelquefois lui rendre visite.

La chapelle du château de Nerbonne était érigée en prieuré, et cette seigneurie était chargée de quelques rentes de blé envers le prieur. A un quart de lieue du château s"élevait l'abbaye de Miseray, occupée par des chanoines réguliers de Saint Augustin. Le voisinage forma une liaison d'amitié entre M. et madame de la Pivardière et le prieur de Miseray. L'église de l'abbaye étant beaucoup plus de Nerbonne que l'église paroissiale de l'endroit, le seigneur et la dame du château, ainsi que leurs domestiques, allaient plus souvent entendre la messe à l'abbaye qu'à la paroisse. Enfin la liaison devint telle, que la chapelle de Nerbonne étant venue à vaquer, de la Pivardière y nomma son ami de Miseray. Ce fut une occasion de se voir plus souvent, ce chapelain étant obligé de venir dire une messe au château tous les samedis.

Tout le temps que la Pivardière resta dans son château, les fréquentes visites du prieur de Miseray ne lui furent point suspectes, mais quand il apprit que pendant les absences qu'il était obligé de faire pour le service du roi, les visites ne s'étaient point ralenties, il en conçut de l'inquiétude; un soupçon jaloux entra dans son âme: il se crut trahi. Il craignit pourtant le ridicule du personnage d'un mari jaloux. Il aima mieux s'absenter pour faire diversion à son chagrin, ou pour n'être pas témoin d'une liaison qu'il n'osait pas rompre.

Ayant quitté le service dés l'année 1695, sans le dire à sa femme, il se mit à voyager. Un jour d'été, il arriva vers le soir dans la ville d'Auxerre; il y aperçut sur les remparts quelques jeunes filles qui folâtraient ensemble. Une d'elles fixa particulièrement son attention; elle était belle: il se sentit trés disposé à l'aimer. Il apprit qu'elle se nommait  Marie Elisabeth Pillard, qu'elle était fille d'un nommé Pillard, mort depuis peu, en laissant vacante une charge d'huissier, et que sa mère tenait une auberge dans la ville. Ces renseignements firent concevoir à notre voyageur l'espoir d'une conquête facile. Son amour, qui s'accroissait à chaque instant, lui fit prendre résolution de se fixer à Auxerre. Il quitta le nom de la Pivardière, pour ne conserver que celui de Bouchet, et alla se loger chez la veuve Pillard. Il parvint à insoirer à la jeune fille la passion dont il était lui-même atteint; mais elle avait de la vertu: et comme elle l'assura que le mariage seul pouvait la déterminer à lui accorder plus que son coeur, de la Pivardière, plus amoureux que jamais, se détermina à devenir bigame. Il épousa sa maitresse, qui lui apporta en dot la charge d'huissier dont il exerça sur le champ les fonctions.

Il goûta avec sa nouvelle femme tourt le bonheur que pouvaient lui pemettre les remords et l'inquiétude qui l'agitaient malgré lui.

Afin de  procurer à l'objet de son amour, qui l"avait rendu père au bout de neuf mois, toute l'aisance qu'il était en son pouvoir de lui donner, de la Pivardière faisait tout les ans un voyage à Nerbonne; et, sous prétexte de se soutenir honorablement dans le service, auquel il feignait d'être toujours attaché, il tirait de sa femme tout l'argent qu'il pouvait, et le portait à la seconde qui se félicitait journellement de l'alliance qu'elle avait contractée.

Quatre années s'écoulèrent pendant lesquelles la demoiselle Pillard donna naissance à quatre enfans. Mais il n'est point de félicité durable; de la Pivardière en fit la triste expérience.

Sa première femme avait conçu quelques soupçons sur sa conduite; il ne paraissait chez lui que rarement, et il s'en retournait toujours en emportant tout argent qu'il y avait au château. Au mois de juillet 1697, elle vit ses inquiétudes se réaliser par une lettre qu'elle reçut de Me Vignan, procureur au parlement de Paris. Ce procureur mandait qu'un capucin d'Auxerre lui avait écrit qu'on était fort en peine de savoir où était la Pivardière, et qu'une femme d'Auxerre lui avait demandé où elle pourrait lui faire tenir les hardes qu'elle avait à lui envoyer.

Une pareille lettre était bien faite pour inspirer de vives craintes à madame de la Pivardière; elle ne douta plus de l'infidélité de son mari. Elle était encore tout occupée de la nouvelle qu'elle venait de recevoir et des reflexions auxquelles elle avait donné lieu, lorsque de la Pivardière se mit en route pour Nerbonne. Le matin du 15 août de la même année, il se trouva au village de Bourg-Dieu, éloigné de sept lieues de son château; il  y fut rencontré par un maçon nommé François Marsau, qui lui témoigna sa surprise de ce qu'il s'arrêtait dans ce lieu, et n'allait pas descendre chez lui. Echauffé plus que jamais par sa jalousie, comme s'il eut eu encore le droit d'être jaloux, il s'écria:"qu'il voulait attendre qu'il fut tard, et n'arriver à Nerbonne que sur le soir, pour y trouver le prieur de Miseray; et qu'il aurait sa vie ou que le prieur aurait la sienne."

Le soir, à cinq heures, ces paroles furent rapportées à madame de la Pivardière et au prieur de Miseray.

De la Pivardière arriva effectivement le soir à son château. Il trouva sa femme à table avec le prieur, et quelques gentilhommes du voisinage ainsi que leurs femmes. A l'arrivée du maître de la maison, tout le monde se leva. Le prieur lui témoigna plus d'amitié et plus de joie de son retour que tous les autres convives. Sa femme seule ne quitta pas son siége et montra une extrème froideur:" Est-ce ainsi, dit à de la Pivardière une dame de la compagnie, qu'une femme doit recevoir son mari qu'elle n'a pas vu depuis long-temps ?" Il répondit: "je suis son mari, il est vrai, mais je ne suis pas son ami." Il se tut ensuite, et se mit à table.

Le sombre accueil que madame de la Pivadière avait fait à son mari, jeta parmi les convives un sérieux qui mit bientôt fin au souper. Tout le monde se retira à dix heures et demie. Resté seul avec sa femme, de la Pivardière lui demanda la cause de sa froideur et de son mépris."va, lui répondit-elle avec l'accent de la colére, va demander à la femme que tu possédes depuis peu, le motif de mon indignation." Plus i ls'efforça de lui persuader qu'il n'était point infidéle, plus elle s'opiniâtra à le croire." dans peu, dit-elle enfin, tu sauras si on fait un pareil outrage à une femme comme moi." Après ces mots, elle alla s'enfermer dans sa chambre, et de la Pivardière se retira dans celle qui lui avait été préparée.

Depuis cet instant, il disparut.

Cette disparition subite causa un étonnement général, mais la surprise fut encore plus grande lorsqu'on apprit que son cheval, ses pistolets, ses bottes et son manteau étaient au château. Un bruit sourd se répandit bientôt qu'il avait été assassiné. Quatre personnes dirent avoir entendu tirer un coup de fusil la nuit du 15 au 16 août. Deux jeunes filles nommées l'une Catherine Lemoine, et l'autre Marguerite Mercier, toutes deux au service de madame de la Pivardière, tinrent même des propos qui semblaient confirmer l'opinion publique. Tout le monde était indigné de ce que les juges du lieu restaient dans l'inaction dans une affaire de cette importance.

Enfin, le bruit de cet assassinat s'étant répandu jusqu'à Châtillon-sur-Indre, Morin, procureur du roi de ce siége, rendit plainte le 5 septembre 1697; il demanda permission d'informer et de faire publier un monitoire. Le lendemain, Bonnet, lieutenant  particulier de Châtillon et le procureur du roi, se transportèrent au village de Jeu (Nerbonne était de cette paroisse); le lieutenant particulier entendit quinze témoins dont la plupart déposèrent des circonstances de l'assassinat qu'ils avaient apprises des deux servantes de madame de la Pivardière. Ses enfans, ses domestiques et elle, ayant été chargés dans cette information, furent décrétés de prise de corps. La fille Lemoine fut arrêtée et conduite en prison. La fille Mercier avait pris la fuite.

Instruite à temps, madame de la Pivardière, qui protestait hautement de son innocence, pria Jacquette Doiselle, sa voisine, de retirer chez elle ce qu'elle avait de plus précieux; elle mit ensuite ses meubles chez différens paysans, et se cacha chez la dame d'Auneuil, son amie, pour attendre l'issue de la procédure et être en état de prendre le parti le plus sûr et le plus judicieux.

Une petite fille de la Pivardière fut amenée chez madame de Préville où elle raconta devant plusieurs personnes que"la nuit du 15 au 16 août, on la fit coucher contre l'ordinaire, dans une chambre haute; qu'elle fut éveillée la nuit par un grand bruit et par une voix lamentable qui disait: ah! mon dieu, ayez pitié de moi; qu'ayant voulu sortir au bruit elle trouva la porte fermée à la clé; qu'elle avait vu, le lendemain, sur le plancher de la chambre, où son père avait couché, plusieurs marques de sang; et qu'elle avait vu aussi sa mère quelques jours après, laver au ruisseau du linge trempé dans du sang." Ce récit dans la bouche d'une enfant, qu'on présume toujours être l'organe de la naïveté fit une impression profonde sur tous les esprits.

Les 14 et 29 du même mois de septembre on continua l'information. L'assassinat fut confirmé de plus en plus par un nombre de témoins. Le prieur de Miseray, dont il n'avait été nullement question jusqu'alors, se trouva chargé, ainsi que deux de ses domestiques qui l'avaient accompagné le 15 août au château de Nerbonne pour faire le service à table.

Marguerite Mercier, accusée par plusieurs témoins d'avoir assisté à l'assassinat, fut arrêtée à Romorantin sur les premiers jours d'octobre. Interrogée elle déclara"que sa maitresse voyant son mari endormi, éloigna tous ceux qui pouvaient lui donner de l'ombrage, qu'elle envoya son fils ainé du premier lit coucher chez le sieur de Préville; qu'une fille qui gardait les bestiaux, fut envoyée coucher dans un endroit éloigné du corps de logis; qu'il n'y eut pas jusqu'à une enfant de neuf ans qui lui fit suspecte; qu'elle le mena elle-même dans une chambre haute, où elle n'avait jamais couché, et que, la voyant endormie, elle l'enferma à clé, et se rendit en bas avec elle et l'autre servante; qu'enfin onze heures de nuit (moment fatal destiné pour ce cruel assassinat) étant passées, la dame de la Pivardière s'étant aperçue que le prieur de Miseray était dans la cour avec ses deux valets, dont l'un, qui était le cuisinier, était armé d'un fusil, et l'autre d'un sabre; comme apparemment elle n'avait pas assez de confiance en Catherine Lemoine, elle envoya cette fille chercher des oeufs dans la métairie voisine; que la dame de la Pivardière joignit le prieur et ses deux valets; que, suivant l'ordre de sa maitresse, elle alluma une chandelle dans la cuisine, et les conduisit sans bruit ; qu'on ouvrit la pôrte; que le cuisinier tira le rideau du lit; et qu'ayant remarqué que le sieur de la Pivardière était couché d'une manière qu'il était difficile de tirer sur lui, il monta sur un placet pour se donner de l'avantage, et lui tira un coup de fusil dans la tête; que le malheureux sieur de la Pivardière, n'étant que blessé du coup, se jeta au milieu de la place, le visage couvert de sang; qu'il demanda à plusieurs reprises la vie à ses assassins et à sa femme en particulier, sans les pouvoir fléchir; que le valet le perça de plusieurs coups de sabre; qu'étant effrayée des cris épouvantables de son maître, le voyant baigné dans son sang, elle ne put s'empêcher de pousser des soupirs; mais qu'elle fut menacée du même sort, si elle se plaignait plus long-temps."

Dans presque tous ses interrogatoires Marguerite Mercier rapporta les mêmes faits avec les mêmes circonstances. Elle ajouta ailleurs" que, peu de temps après, les valets du prieur emportèrent le corps sans qu'elle ait pu savoir ce qu'ils en firent; que pendant leur abscence la dame de la Pivardière apporta de la cendre elle-même, et lui fit frotter le plancher pour ôter les marques de sang; qu'on ôta de la paillasse la paille qui en  était teinte, qu'on la remplit d'une paille demi-battue; que les valets du prieur retournèrent à Nerbonne deux heures après en être sortis, et que la dame de la Pivardière les régala, et but  et mangea avec eux et qu'après ce repas ils se retirèrent."

Ce témoin avait nié jusque-là que le prieur de Miseray eût été présent à l'assassinat, mais elle le chargea enfin dans une circonstance où il était fort difficile de ne pas ajouter foi à sa déclaration. Etant tombée dangereusement malade, elle fit appeler un confesseur auquel elle recommanda de faire savoir à Jacquemont, lieutenant de l'official de Bourges, que le prieur de Miseray avait tué de la Pivardière. Elle demanda ensuite à parler aux juges et leur déclara" qu'elle avait déguisé la vérité à l'égard de ce religieux; qu'il avait été présent à l'assassinat, et avait lui-même arraché la vie au sieur de la Pivardière par un dernier coup."

Catherine Lemoine déposa: "qu'étant descendue dans la cour, la dame de la Pivardière trouva le cuisinier et valet du prieur de Miseray, et dit: allez, un par le fossé, et l'autre, entrez par la chambre, et envoya la répondante chercher des oeufs pour faire manger auxdits hommes. Elle en alla quérir chez François Hybert, métayer de la grande métairie; elle apporta des oeufs au château; qu'ayant voulu connaître le motif du coup de fusil qu'elle avait entendu, elle entra dans la chambre, et trouva qu'on achevait de poignarder le sieur de la Pivardière. Qu'elle dit aux deux hommes, prenez le corps avec ses habits, et allez enterrer le tout, sans nommer le lieu, et qu'ils le sortirent du château; et après elle envoya la répondante chez le nommé Pinceau, quérir du pain; et trouva à son retour les deux hommes qui mangeaient; qu'après ils s'en allèrent."

Plus de trente témoins, la plupart amis de madame de la Pivardière déposèrent du fait de l'assassinat, et à peu prés des mêmes circonstances.

le lieutenant particulier, après quarante-deux jours de l'assassinat, se transporta au château de Nerbonne, sur un avis qu'on lui avait donné, et dressa procés verbal pour constater quelques traces de sang qu'il trouva sur le plancher de la chambre de dela Pivardière.

Le prieur de Miseray se trouvant impliqué dans l'assassinat par la déclaration de Marguerite Mercier, fut décrété de prise de corps.

Tandis que l'on informait à Châtillon-sur-Indre de l'asassinat de de la Pivardière, et que l'on y réunissait les preuves de ce crime, on en accumulait d'autres à Romorantin qui tendaient à justifier que "l'assassiné" était vivant, et même que personne n'avait jamais attenté à ses jours.

En effet, de la Pivardière se portait à merveille.

Voici ce qui donna lieu à sa disparition. A peine s'était-il retiré dans la chambre, qu'il y fut rejoint par Catherine Lemoine: elle lui dit en confidence que s'il restait dans le château il courait risque d'être arrêté. De la Pivardière qui se sentait coupable de bigamie, et qui craignait que sa femme ne fût sur la voie pour découvrir ce crime, et qu'elle n'eût pris la résolution de la perdre, ne négligea point l'avis qui venait de lui être donné. Il partit avant quatre heures du matin, espérant se soustraire au danger par la promptitude de sa fuite, il laissa le cheval qu'il avait amené,. ce cheval boitait: il avait été forcé de la trainer par la bride en arrivant la veille au château. Obligé d'aller à pied et ne voulant emporter que son fusil, il laissa tout ce qui aurait pu gêner dans sa marche. De là, le manteau, les bottes et les pistolets trouvés dans sa chambre.

De la Pivardière passa le 16 août, le lendemain de son prétendu assassinat, à Bourg-Dieu: il logea le 17 à Châteauroux dans l'auberge des trois-marchands; le 18 il coucha à Issoudun, à l'hôtellerie de la cloche; puis il continua sa route jusqu'à Auxerre, où il se crut à l'abri de toute poursuite.

Cependant madame de la Pivardière faisait chercher son mari en tous lieux. L'avis qui lui avait été donné quelques jours avant l'arrivée de celui-ci à Nerbonne, lui fit présumer enfin, qu'il pouvait bien s'être retiré à Auxerre. On fit des perquisitions dans cette ville, et l'on apprit qu'il y était marié sous le nom de du Bouchet avec la nommée Pillard, et qu'il y exerçait les fonctions d'huissier.

Lorsque de la Pivardière sut qu'on le cherchait de la part de sa première femme, la peur s'empara de lui; il prit la fuite. On le poursuivit jusqu'à Flavigni où on parvint à le rejoindre. Là on lui apprend que sa femme est accusée de l'avoir fait assassiner, et que les juges de Châtillon instruisent son procés. Sa frayeur alors change d'objet: ce n'est plus pour lui qu'il tremble; c'est pour sa femme.

Sa seconde femme vient généreusement au secours de la première. Elle oublie sa propre injure, et songe à dérober à l'échafaud la rivale qui lui enléve un homme qu'elle n'a point cessé d'aimer malgré tous ses torts; elle se détermine même à secourir cette infortunée.

Avant de partir pour Nerbonne, de la Pivardière passa devant deux notaires un acte constatant son existence, qu'il signa de sa propre main et qu'on fit légaliser. Il écrivit à sa femme et à son frère. On lui manda que sa présence était nécessaire à Nerbonne: il n'hésita point à partir, au risque de ce qui pourrait  lui en arriver. Il trouva son château dans un état complet de dévastation, les plombs de la couverture, les portes, les chassis des croisées, tout avait été enlevé. Il se vit contraint d'aller loger chez son frère.

Il se présenta devant le juge de Romorantin et demanda que l'on procédât à sa reconnaissance dans tout les lieux circonvoisins de Nerbonne.

A Lucé, de la Pivardière fut reconnu par le curé, par les officiers de la juridiction et par une douzaine d'habitans. Au village de Jeu, il entra dans l'église au moment où l'on chantait les vêpres; son arrivée causa une si grande rumeur, que le service fut interrompu. On le croyait mort; l'apparition d'un spectre n'eût pas causé plus de frayeur ni de surprise; enfin, quand on l'eût bien examiné, il fut reconnu pour le véritable de la Pivardière par plus de deux cents personnes, qui, à l'issue de vêpres, l'attestèrent avec serment au juge de Romorantin; le curé lui-même le reconnut, et son témoignage ne pouvait être suspect, car il était personnellement intéressé à la preuve de l'assassinat, ayant jeté un dévolu sur la chapelle de Nerbonne, desservie par le prieur de Miseray, qui, comme complice du crime, perdait tous ses bénéfices.

Il fut également reconnu par sa fille, agée de neuf ans, la même qui avait déposé avoir vu du sang dans la chambre de son père, et sa mère laver des linges ensanglantés.

Il fut reconnu enfin à Miseray par des gentiis-homme, des prêtres, des religieux et par une nourrice qui avait allaité ses enfans.

Le lieutenant particulier de Châtillon s'étant transporté aux étangs de Nerbonne pour y faire la perquisition du cadavre, de la Pivardière qui en fut averti, se présenta à ce juge et lui dit:"ne cherchez point dans le fond de l'étang ce que vous trouvez sur le bord."

Le juge fut saisi d'une si grande frayeur, qu'il courut à son cheval et prit la fuite au galop. Ce juge dit ensuite pour s'excuser, qu'il avait cru voir l'ombre de la Pivardière.

Toutes ces démarches n'eurent cependant pas le succés qu'elles avaient d'abord semblé promettre. Ce qui se passa dans les prisons de Châtillon plongea cette affaire dans les ténèbres d'où on la croyait prés de sortir. Le juge de Romorantin, accompagné du prêvot de la maréchaussée de Châtillon, ayant confronté de la Pivardière aux deux servantes qui avaient déposé de l'assassinat, celles-ci soutinrent à leur maître qu'il était un imposteur, et elles alléguèrent des différences qui étaient, dirent-elles, entre de la Pivardière et celui qui le représentait. Cette déclaration donna lieu de croire que le lieutenant particulier leur avait défendu de reconnaître leur maître: l'une d'elles le déposa même précisément. Le lieutenant avait pris la précaution de faire tenir la prison fermée, avec ordre de n'y laisser entrer personne; et il protesta contre la violence que ferait le juge de Romorantin et le prévôt pour entrer.

Tandis que cette confrontation avait lieu, le substitut du procureur général au siége de Châtillon, requérait que de la Pivardière fût écroué, pour éclaicir entiérement la vérité; mais celui-ci, craignant que le crime de bigamie dont il s'était rendu coupable, ne le conduisît à l'échafaud, s'il était arrêé, ne jugea pas à propos de déférer à cette réquisition: il sortit de Châtillon en toute hâte, favorisé par le lieutenant général de Romorantin.

Il se fit reconnaître de toute sa famille et signa les procés verbaux que le juge de Romorantin dressa de toutes ces reconnaissances.

Cependant le lieutenant particulier de Châtillon ayant dressé un procés verbal du transport du juge de Romorantin dans la prison de Châtillon, continua l'instruction du meurtre d'un homme vivant. Mais les juges de cette ville regardèrent ce qui s'était passé comme un attentat à leur juridictionet à leur autorité; ils eurent recours en conséquence au procureur-général, et lui envoyèrent les informations et le procés verbal pour lui rendre compte des faits. Ce magistrat prit fait et cause des juges de Châtillon; il donna sa requête à la cour par suite de laquelle intervint un arrêt du 17 janvier 1698, qui "fit défense au juge de Romorantin de passer outre, de faire aucune procédure, et aux parties, de poursuivre ailleurs qu'au parlement, sans préjudice de l'instruction du procés, et ordonna que le lieutenant général de Romorantin et le prévôt de la maréchaussée seraient ajournés pour comparaître en personne à la cour, pour y être ouïs et interrogés sur les faits résultants du procés verbal des juges de Châtillon." Le procureur général fit alors arréter le prieur de Miseray: on mit les fers aux pieds à cet accusé. De la Pivardière intervint dans le procés comme prenant fait et cause de sa femme.

L'official de Bourges, à la requête du promoteur, qui avait intenté une accusation d'adultère contre le prieur de Miseray, l'avait condamné par contumace, antérieurement à son arrestation.

Le prieur de Miseray, de la Pivardière et sa femme prirent à partie le lieutenant particulier de Châtillon et le procureur du roi, et se rendirent appelans comme abus de la procédure et du jugement de l'official de Bourges.

L'archevêque de Bourges intervint pour prendre fait et cause de son official.

Pour bien saisir le motif qui avait dirigé la conduite du procureur général, il ne faut pas perdre de vue qu'il se faisait à la fois deux procédures qui avaient sur le même objet, chacune un but tout à fait opposé.En effet, dans l'une, on cherchait à établir que de la Pivardière avait été assassiné par sa femme et par le prieur de Miseray; dans l'autre, on voulait au contraire prouver que ce même de la Pivardière était vivant, et que jamais on n'avait cherché à attenter à ses jours. La première était la conséquence d'une plainte rendue par le ministére public; l'autre n'était appuyéeque d'un arrêt obtenu le 18 septembre 1697 de la chambre de vacation par madame de la Pivardière, qui la renvoyait par devant le lieutenant général de Romorantin, pour être informé de la vie de son mari qu'on l'accusait d'avoir fait mourir.

Il n'était donc pas possible que le procureur général laissât subsister une procédure aussi monstrueuse qui, si on ne l'eût arrêtée dans son cours, aurait pu envoyer des innocens au supplice et absoudre les coupables.

Madame de la Pivardière se mit en état. Son mari, en demandant dans ses conclusions l'absolution de cette dame, requit que Bonnet et Morin fussent déclarés pris à partie et condaamnés à des dommages et interêts; il demanda en outre, qu'attendu la bigamie dont il s'avouait coupable, il fût mis sous la protection et sauvegarde de la cour, qu'elle lui accordât un sauf conduit de quatre mois, avec défense d'attenter à s personne; enfin que vérification fût faite de son écriture antérieure et postérieure au jour où on le supposait assassiné.

Le lieutenant général de Romorantin et le prévôt de la maréchaussée de Châtillon, ayant comparu à la cour et subi l'interrogatoire, furent renvoyés dans les fonctions de leurs charges.

La cause fut portée en audience, enfin le 23 juillet 1698, après quinze jours de plaidorie, et d'après les conclusions de Portail, alors avocat général, intervint un arrêt par lequel il fut dit "qu'il y avait abus dans la procédure de l'official de Bourges, que les témoins, ainsi que Catherine Lemoine et Marguerite Mercier, seraient de nouveau confrontés au prieur de Miseray, que les témoins entendus par le juge de Lucé, autres néan-moins que ceux qui avaient été récollés dans leurs dépositions, et valablement confrontés devant le juge de Châtillon, seraient récollés en leurs dépositions, et confrontés auxdits accusés; le tout pardevant le criminel de Chartres; que le procés serait fait et parfait tant à Marguerite Chauvelin, femme de la Pivardière, qu'à ses deux servantes, au prieur de Miseray, et à Renaud son valet, par ledit juge de chartres, à la requête du procureur du roi au même siége, jusqu'à sentence définitive inclusivement ; sauf l'exécution en cas d'appel. il fut ordonné que les procédures faites, tant au siége de châtillon que par le juge de Lucé, seraient portées au greffe de Chartres, et les prisonniers transféres dans les prisons de cette ville...Quant à l'appel interjeté par le procureur général, de la procédure faite par le lieutenant criminel de Romorantin, en conséquence, le prétendu de la Pivardière fut débouté de son intervention et de ses demandes; il fut ordonné que les fers mis aux pieds du prieur de Miseray lui seraient ôtés. Sur la prise à partie des juges de châtillon et sur les autres demandes, les parties furent mises hors cour. Faisant droit sur les conclusions du procureur général, il fut ordonné que Louis Du Bouchet, se disant de la Pivardière, serait pris au corps et mené prisonnier à Chartres pour répondre aux conclusions que le procureur du roi en ce siége voudra prendre contre lui."

Cet arrêt, qui ordonnait que le procés serait fait aux accusés, n'était point un préjugé contre leur innocence; mais on ne pouvait les acquitter qu'après une instruction dans les régles, il fallait d'ailleurs que de la Pivardière fût présent, et puisqu'il refusait de comparaître, il devenait nécessaire de le décréter. Son asence favorisait l'opinion qu'on avait de son imposture: il ne pouvait risquer de se représenter étant prévenu du crime de bigamie. En voulant justifier sa femme il s'exposait à une mort certaine.

Toujours bonne, généreuse, sa seconde femme, soutenue par le crédit de personnes puissantes, alla se jeter aux genoux du roi et sollicita un saufconduit pour ce mari qui li échappait, afin qu'à l'abri de l'autorité royale il pût se présenter, et obtenir l'entérinement des lettres de requête civile qu'on lui conseilla de prendre contre l'arrêt. Louis XIV la fit relever avec bonté, et ayant appris qui elle était, il lui dit: " une fille faite comme vous méritait un meilleur sort." Il lui accorda, en admirant sa générosité, le saufconduit qu'elle demandait.

Ce saufconduit, daté de Versailles, le 26 août 1698, fut renouvelé plusieurs fois pendant le cours du procés.

Muni de cette sauvegarde, de la Pivardière se constitua volontairement prisonnier au For-l'Evêque à Paris le 1 septembre suivant, pour justifier, dit-il dans son écrou,"qu'il est véritablement  Louis de la Pivardière, écuyer, sieur du Bouchet, mari de dame Marguerite Chauvelin."

Ayant pris des lettres en requête civile, contre l'arrêt du 23 juillet , il poursuivit l'entérinement . il obtint d'abord un arrêt du mois de février 1699, qui ordonna qu'il serait procédé à sa reconnaissance.

Pendant l'instruction, Bonnet, juge de Châtillon, mourut. Les héritiers demandèrent et obtinrent qu'il fût mis hors de cours.

Enfin l'affaire étant portée en audience, Me Nivelle, célèbre avocat, plaida pour de la Pivardière. Me Terrasson parla pour le cuisinier de madame de la Pivardière, accusé d'avoir été l'assassin du mari. Me Gondouin, avocat du prieur de Miseray et Me Martinet, avocat de madame de la Pivardière adhérèrent aux conclusions de Me Nivelle, et employèrent ses moyens.

Me Robert, avocat du sieur Morin, substitut du procureur général à Châtillon, plaida ensuite. On reconnaît aisément l'intérêt que ce magistrat avait d'empêcher l'entérinement des lettres en formes de requête civile, attendu que si les parties étaient remises au même état qu'elles étaient avant l'arrêt, cela faisait renaître la reprise de prise à partie et le replongeait dans un nouveau procés dont la fin pouvait lui être désavantageuse.

Le mercredi 22 juillet 1699, lorsque tous les avocats des parties eurent conclu, d'Aguessseau, alors avocat général et depuis chancelier de France, prit la parole et dans un discours plein de force, conclut en aveur de de la Pivardière et des accusés.

Les juges furent long-temps aux opinions. On suivit les conclusions de d'Aguesseau. Bailleul, président, qui prononça l'arrêt, ajouta dépens réservés et les amendes confisquées pour les requêtes civiles rendues.

l'arrêt est conçu en ces termes.

"Après que Nivelle, avocat pour de la Pivardière, Terrasson, avocat pour Renaud, ec, etc, ont été ouîs; ensemble maître d'Aguesseau pour le procureur général du roi, pendant quatre audiences, la cour a donné acte à la partie de Nivelle de la reconnaissance de sa personne; et en conséquence, ayant égard aux lettres en forme de requête civile, et icelles entérinnt, a mis toutes les parties en tel état qu'elles étaient avant l'arrêt du 23 juillet 1698. Ce faisant , ordonne que la partie de Nivelle sera élargie et mise hors des prisons; à ce faire les greffiers et géôliers contraints par corps; quoi faisant, déchargés, et seront les amendes consignées sur les dites requêtes civiles, rendues tous dépens réservés. Fait en parlement, etc."

De la Pivardière fut seul élargi, parcequ'il s'était constitué volontairement prisonnier; quant aux autres accusés, si on eût ordonné qu'ils fussent mis en liberté, on aurait prononcé irrégulièrement, les parties ne pouvant être mises que dans le même état où elles étaient avant l'arrêt.

On ordonna que le procés serait fait aux deux servantes, à cause de leurs faux témoignages. l'instruction fut renvoyée pardevant le lieutenant général d'Issoudun. Dans le cours du procés Catherine Lemoine mourut. Sa mort éteignit la poursuite de son crime.

Le fonds du procés fut enfin jugé. Cette affaire, qui avait occupé le public pendant quatre ans, sur lequelle les préjugés et les intérêts avaient varié plusieurs fois, se termina par arrêt du 14 juin 1701, au rapport de de Sarron. " Marguerite Mercier fut condamné à faire amende honorable, nu-pieds, le corde au cou, tenant en ses mains une torche ardente du poids de deux  livres, au devant de la principale porte de Châtillon sur Indre; et là; étant à genou, dire et déclarer à haute-voix, que méchamment et comme mal avisée, elle a fait les fausses déclarations mentionnées au procés, dont elle se repent et demande pardon à Dieu, au roi et à la justice. Ce fait, battue et fustigée nue de verges par les carrefours et lieux accoutumés de ladite ville de Châtillon; et à l'un d'iceux flétrie d'un fer chaud marqué d'une fleur de lys sur l'épaule dextre; bannie à perpétuité du ressort du parlement, avec injonction de garder son ban, sous les peines portées par les lois; ses biens situés en pays de confiscation, confisqués au profit de qui il appartiendra, sur iceux préalablement  prise la somme de 50 livres d'amende envers le roi. Faisant droit sur les appellations comme abus, la cour déclare la procédure de l'official de Bourges nulle et abusive, en ce que le nom de la femme de la Pivardière est compris dans la sentence du 1er février 1697, par laquelle le prieur de Miseray avait été déclaré convaincu d'aldutère. La procédure faite par le lieutenant général de Romorantin déclarée nulle; et cependant la Pivardière, sa femme, le prieur  de Miseray, Renaud et Mercier, ses valets, déchargés de l'accusation contre eux intentée; ordonne que les écrous faits de leurs personnes seront rayés, et sur le surplus de toutes les autres demandes et requêtes, toutes les parties mises hors de cours."

Cet arrêt , tout en mettant fin aux inquiétudes et aux persécutions dont madame de la Pivardière avait été si long-temps la proie, ne lui rendit point la confiance de son mari, qui, toujours atteint de jalousie ne voulut jamais retourner à Nerbonne. Il obtint du duc de la Feuillade dont il était parent, un emploi qui lui coûta la vie dans un combat qu'il livra étant à la tête d'une brigade, à des contrebandiers qu'il voulait arrêter.

Sa premiére femme ne lui survécut pas long_temps. Un matin on la trouva morte dans son lit.

Le prieur de Miseray qui avait rompu tout commerce avec elle, mourut fort agé dans son prieuré.

Quand à Marie Elisabeth Pillard, seconde femme de de la Pivardière, après avoir perdu les enfans qu'elle avait eus de lui, elle contracta successivement  deux autres mariages qui furent plus heureux que le premier."

 

le village où se passe l'action est Jeu Maloches entre Ecueillé et Moulins sur Céphons. on recconnait bien tout les lieux décrits plus hauts. par contre, ce n'est plus Nerbonne mais Narbonne. quelle est le rapport entre Poulaine et de la Pivardière? en était-il originaire ? encore quelques réponses à trouver.

 

 

 

 

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