Evenements Météorologiques surtout le petit air glaciaire: 1694-1710

 j'ouvre cette page pour vous faire comprendre l'énorme mortalité que notre famille a subit lors de l'automne 1710. des centaines de morts m'ont fait réfléchir sur les causes éventuelles de cette hécatombe. serait-ce du à l'eruption d'un volcan comme le Santorin qui ruina le pourtour méditérranéen quelques milles ans avant J-C ? ou plus proche de nous, en 1785 l'éruption en Islande qui créa un grand riff et qui provoqua une famine chez nous? cause probable de la révolution. Je vous donne quelques texte de cette période et continue mes recherches sur les causes possibles de ce désastre.

Ci-dessous, la reproduction d'un texte que Messire Denis Aujeard, curé de La Chapelle Thireuil en 1709, a cru bon écrire sur les feuillets de son registre paroissial. La transcription qui suit respecte l'orthographe et la ponctuation de l'époque :

Mémoire curieux pour la postérité

On reparlera dans la suite des temps comme des choses surprenantes extraordinaires et mesme impossibles ce qui est arrivé dans la présente année mil sept cent neuf par rapport à la rigueur de l'hiver et aux gelées excessives qui y sont arrivées etqui ont esté la cause d'une famine presque générale et qui ont produit des pertes dont on se ressentira plus d'un siècle.

Premièrement, on saura qu'autour de la fête de la Saint Michel Archange 1708 le bled froment ne valait pas plus de vingt cinq sous le boisseau mesure de (Champdenier ?), et le seigle quinze sous, la baillarge huict et le bled noir six, le vin de pays quatre livres la barrique et celui de Saintonge huict, mais il y eut en peu de temps bien du changement, tant par les séditions populaires faites pour s'opposer à l'enlèvement et transport des grains, que par les grands froids qui ont commencé au jour des rois de cette présente année 1709 et qui ont duré autour de six semaines, car presque tous les bleds ont gelé, et on peut compter pour rien ce qui a resté, de telle sorte qu'on a esté obligé de semer au printemps tout comme si on ne l'avoit point fait auparavant l'hiver. Mais comme cette saison ne permet pas de mettre en terre toutes sortes de grains, on a eu recours aux baillarges et bleds noirs, ce qui les a fait valoir un prix pour ainsi dire incroyable puisque la baillarge s'est vendue pour semer au mois de mars, avril, et jusques au quinze mai 1709, quatre livres dix sous, et le bled noir vingt quatre livres le boisseau, et communément dix huit et vingt livres, et au mois de septembre suivant, le froment a valu pour semer, lorsqu'il était bon et nouveau, dix livres et le seigle cinq livres, et le reste de l'année, et mesmes jusques à la récolte de l'année 1710, qui est le temps que j'écris le présent mémoire, il a valu le mesme prix ou du moins il y a eu très peu de diminution, quoiqu'il y ait apparence de la plus belle récolte en bleds que jamais homme vivant ait vu. Pour ce qui est des (foins), on en espère très peu aussi bien que de vin, dans les pays voisins à cause de la gelée arrivée le premier jour de may de cette année 1710, mais la plus grande perte arrivée par le froid de 1709 après celle des bleds et dont on se ressentira plus que de mémoire d'homme est à l'égal des chasteigners et noyers qu'on peut dire avoir entièrement été détruits, et principalement les plus grands et les plus vieux dans le pays de Gastine. Tous les genêts et ageons ont été gelés. On attribue encore usuellement, de l'avis des médecins et chirurgiens, à cette gelée, la cause de la mortalité et du plus grand nombre des maladies contagieuses qui règnent présentement presque dans tout l'univers.

 

Le "Grand hyver" 1709 à Vougy (Loire).

" le soir du six janvier, il commença à faire froid, et ce froid fut si extraordinaire et si violent pendant cinq à six jour qu'on disait n'en avoir jamais vu un semblable. le temps se radoucit et il fit quelques pluies et neiges, qui rétablirent en apparence tout ce que la rigueur du froid avait beaucoup mortifié. Mais il survint un second froid vers le vingt janvier, qui fut plus violent et plus aigu que le premier qui fit beaucoup de mal, puisqu'il tua et fit mourir beaucoup de pauvres, qui, s'étant couchés se portant assez bien, on les trouvait le lendemain matin morts par la rigueur du froid. il mourut beaucoup de bétails, boeufs, vaches, chevaux, ânes, beaucoup de brebis et d'agneaux. on crut que toutes les brebis et agneaux périraient et on fit tout ce qu'on put pour en échapper quelques uns. on les mettait auprès du feu; on les faisait manger, et où les étables ne se trouvaient pas assez chaudes ^pour empêcher le bétails de souffrir extraordinairement, le poil tomba à la plus grande partie des boeufs, des vaches, des chevaux et des ânes, de manière que les pauvres b^^etes faisaient horreur. j'ai enterré une douzaine tant d'hommes que de femmes qui sont morts par la violence du froid. j'ai oublié de parler de la quantité en poules, dindes, oies qu'on a trouvées mortes de froid, dans les génissiers, aussi bien que de petits oiseaux de toutes espéces qui se retiraient dans les maisons pour se mettre à couvert et se garantir du froid.on a trouvé beaucoup de perdrix, de liévres ainsi que beaucoup de petits oiseaux morts par le froid, et jamais on n'a vu moins d'oiseaux dans les campagnes surtout au printemps de 1709 à 1710. ce n'est pas encore le plus grand mal que nous a fait l'hiver. voici le fléau violent. tout ce qu'on a semé en blé, froment et autres grains qui passent l'hiver en terre gela entièrement et universellement dans tout les meilleurs pays et province du royaume; si bien qu'on ne recueillit aucun blé ni froment, pas même pour semer en 1710. il y eut quelques particuliers qui semérent incessament après l'hivers quelques mesures du seigle qu'on appelle tramois et qui en cueillir assez honnêtement pour le peu qu'ils avaient semé. enfin la cherté du blé commença au mois de janvier 1709 et alla toujours en augmentant de prix jusqu'au mois de juin, si bien que le seigle se vendait au commencement de mai jusqu'à huit livres dix sols, mesure de Charlieu, et le froment neuf livres dix sols, le pain blanc cinq sols et demi et quatre sols celui de seigle gros pain. jamais on n'a vu tant de pauvres misérables, tant de larrons ni fripons. la pauvreté donnait lieu et inspirait à beaucoup de personnes à voler et à dérober. les personnes qui avaient quelque chose avaient de la peine à empêcher d'être dérobées. on volait de nuit et de jour boeufs, vaches, moutons et meubles. on ne laissait rien dans le jardin. il y avait trés peu de personnes qui se trouvassent en état de secourir les pauvres par quelques aumônes. les années précédentes, les pauvres étaient difficiles à contenter par l'aumône qu'on leur faisait et ils la méprisaient surtout lorsqu'on ne donnait que du pain; mais ces deux années ils en ont demandé et ils n'en ont pu avoir que dans quelques maisons. ils étaient bien aise lorsqu'on leur donnait une rave grosse comme un oeuf et ils la prenaient avec plus d'humilité et faisaient plus de remerciements pour cette petite rave qu'ils n'en faisaient pour une livre de pain lorsqu'il était commun. la famine a été si grande qu'on ne peut concevoir la quantité de personnes mortes de faim dans les chemins en allant demander l'aumône. il y en eut beaucoup de dévorées par les chiens et les loups; enfin il est mort pour le moins la moitié des habitants de cette paroisse. il est resté trés peu d'enfants. il est peu resté de monde à Pouilly et à Nandax. de quatre cent dix communiants que j'avais en 1708, il ne m'en est resté que 240. il se faisait beaucoup de pain de fougére, et en toutes les paroisses voisines, aussi bien que celle-ci, on voyait à l'issue de la messe paroissiale, à la porte des église, beaucoup de pains de fougéres et de gaufres qu'on vendait assez chérement. on vendait une gaufre un sol et deux sols la livre de pain de fougére. on n'avait jamais tant vu de ravanelles dans les terres qu'il y en eut cette année-là. il s'en mangea une prodigieuse quantité. on en faisait cuire de grands pleins chaudrons, que l'on mangeait sans pain, sans sel et sans beurre. j'ai vu beaucoup de personnes ramasser des herbes dans les prés qu'elles mangeaient toutes crues. il se mangea beaucoup de chiens et de chats que l'on écorchait; on mettait la viande sur le grill, qu'on mangeait à moitié grillée. il y en a beaucoup qui mangeaient la viande toute crue. il se cueillt presque point de vin en 1709. il fut extrémement cher au mois de juillet et d'août de 1710. la botte de vin se vendait cent dix livres et s'est vendue jusqu'à cent cinquante livres. des marchands de Fleury, au delà de Charlieu, en menèrent quelques piéces du côté d'Orléans qu'ils vendirent jusqu'à soixante escus. en 1710 il se cueillit assez de blé, seigle et froment pour le peu qu'on avait seé, mais beaucoup de menus grains, féves, bréchères, orges, avoines, ce qui sera d'un grand secours, parce que l'on a semé et l'on séme la plus grande partie de froment et de seigle qu'on a cueille. il en est resté si peu, que les trois quarts des gens ne mangérent que du pain d'orge, buchére et féves. on n'a jamais vu faire si peu de vin et l'on ne l'a jamais vu si cher qu'en cette année 1710, en vendanges, car il se vend jusqu'à 60 sols la piéce, et c'est à qui des marchands de Paris et d'ailleurs pour en avoir."

(registre parroissial de Vougy, A.D de la Loire).

 

UNE VILLE UNE HISTOIRE Chroniques des pays de l’Yonne 

Dans la rue du Pont, le cheval dérapa sur le verglas et s'affaissa en gémissant. Dévorés de froid et de faim, trente enfants en guenilles l'encerclèrent aussitôt de leurs spectres menaçants.

En ce mois de janvier 1710, le ciel restait d'un bleu accablant, et déversait sur la terre une chape de froid. Il n'y avait pas de neige, et nuit après jour la froidure pénétrait dans les sols, enserrant de son linceul de pierre tout ce que les paysans avaient semé. L'hiver passé, les vignes avaient gelé; cet hiver-là, ce furent les blés qui succombèrent. Dans les forêts, le silence était troué par les craquements des arbres qui se fendaient. Dans les caves, le vin à son tour se pétrifia. Depuis plusieurs semaines déjà, on avait renoncé à enterrer les morts : statues de chair glacée, les cadavres s'alignaient dans les granges, en attendant qu'il fut possible aux fossoyeurs d'entamer le sol des cimetières.

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Autres extraits de la période de 1694, le début du "petit âge glaciaire":

la guerre de succession d'espagne: les pertes militaires pèsent peu à côté des mauvaises récoltes à répétition que provoquent étés pluvieux et hivers glaciaux. Mal nourries, quand elles ne meurent pas littéralement de faim, les populations sont la proie de maladies endémiques qui se transforment alors en épidémies, telle la redoutable dysenterie. En 1693-1694, tout concorde pour donner lieu à la plus grave crise de subsistance de l'Ancien Régime.

La vie précaire

Dans la France de l'époque, on ne meurt généralement pas de faim. En année normale, la population est à peu près convenablement nourrie, même si l'immense masse des humbles se contente d'une tranche de pain trempée dans un potage de légumes — «la soupe» —, qu'un morceau de lard parfume parfois et où manque encore la pomme de terre... Mais l'agriculture, avec ses rendements dérisoires, reste un exercice précaire qui, chaque année, rend redoutable la période dite «de la soudure», celle où, aux environs de mai les réserves de l'armée passée s'épuisent alors que le blé sur pied n'est pas encore prêt à être moissonné.
En 1693 après plusieurs mauvaises années, la récolte s'avère très médiocre : aux Halles de Paris, en juin, un pain d'une livre coûte à un ouvrier l'équivalent d'une journée de travail. L'hiver qui suit est exceptionnellement rude et les organismes affaiblis par la malnutrition supportent mal les basses températures : on meurt en abondance dans toutes les villes de France. Puis survient le printemps, désespérément sec, au moment où l'on attend des pluies pour nourrir les semences. Une partie
des vivres disponibles est réquisitionnée pour les besoins de l'armée des Flandres; le reste est acheté en hâte par des spéculateurs qui misent sur le renchérissement des cours. Une tension s'installe entre les provinces, peu soucieuses de laisser partir leurs grains, et le pouvoir central, qui craint la fureur des Parisiens et se soucie de constituer des stocks.


L'effroyable famine

Dans la capitale, cependant, à l'été 1694, l'heure est à l'angoisse et non encore a la colère À l'initiative des clercs, de longues processions se forment autour de la chasse de sainte Geneviève, patronne de la cite. Sur ordre de la municipalité et appointes par elle, des «chasse-gueux» se chargent d'expulser les pauvres; il en va ainsi également dans la plupart des villes de France. Condamnes a l'errance, les malheureux se jettent dans les champs sur le blé encore vert et le dévorent : il
faut instituer un système de surveillance des récoltes. Mais la situation des campagnes n'est pas meilleure : dans bien des régions, en particulier dans le Massif central - le Limousin et l'Auvergne sont particulièrement touches —, de nombreux paysans quittent leurs villages et se lancent à leur tour sur les routes, tachant, a
force de mendier, de gagner les villes ou ils espèrent trouver de la nourriture...

Quand toutes les céréales sont épuisées - le froment, le seigle, l'avoine après le blé -, es pauvres se trouvent réduits à recueillir les glands ou les fougères pour en faire une sorte de pain. Ces «méchantes herbes» achèvent de ruiner la santé des malheureux, qui enflent après y avoir eu recours. Les orties, les coquilles de noix, les troncs de chou, les pépins de raisin moulus n'ont pas meilleur effet. Les curés, qui nous renseignent sur ces tristes expédients, parlent aussi des bêtes, ( qu'on ne nourrit plus et qui meurent avant les hommes : les charognes de chiens, de chevaux et «autres animaux crevés» sont consommées en dépit de leur état de pourriture  des sources indirectes mentionnent des cas de suicides et d'autres, plus rares, d'anthropophagie.

 

Durant tout l'été 1694, la chaleur, qui accélère la putréfaction des milliers de cadavres sur les chemins, est responsable de graves épidémies. La typhoïde, notamment, propagée par l'eau et les aliments souillés, achève ceux qui ont réussi à se nourrir un peu. Les organismes, affaiblis, sont moins féconds : la natalité, loin de compenser le nombre des morts, fléchit durant tous ces mois. C'est la dernière grande famine de l'Ancien Régime, terriblement meurtrière : elle légitime le nom qu'un historien a récemment donné à cette période sombre, «les années de misère».

 

Le pain est, pendant toute, l'époque moderne, le fondement même de la nourriture et sa composante essentielle, Que le blé vienne à manquer, et c'est la famine (détail d'une peinture de j Le Nain, la Famille de paysans dans un intérieur, Paris, musée du Louvre).


L'horrible menu

Mort à l'automne de 1694, le prêtre stéphanois Jean Chapelon a mis en vers la triste litanie des nourritures dont doivent se contenter ses contemporains durant la famine : « Croiriez-vous qu'il y en eut aw, à grands coups de couteau, 1 Ont disséqué des chiens et des chevaux, /Les ont mangés tout crus et se sont fait une fête/De faire du bouillon avec les os de la tête. Les gens durant l'hiver n'ont mangé que des raves 1 Et des topinambours, qui pourrissaient en cave, /De
la soupe d'avoine, auel^ues trognons de chou 1 Et mille saletés qu'ils trouvaient dehors, /jusqu'à aller les chercher le long des Furettes [le marché aux bestiaux], /Et se battre leur soûl pour ronger des os. Les boyaux des poulets, des dindons, des lapins 1Étaient pour la plupart d'agréables morceaux. »
Cité par M. Lachiver, les Années de misère/ Paris, Fayard, 1991.

 


Paysage d'hiver (peinture de J. Montrer le Jeune, Châlons-sur-Marne, musée des Beaux-Arts). A la fin du XVll siècle et au commencement du XVlll, le refroidissement du climat, qui a fait parler de «petit âge glaciaire», eut des conséquences catastrophiques sur l'agriculture.


Le petit âge glaciaire

La famine de 1693-1694 est la conséquence de la dégradation climatique qui s'observe dans les 10 ans qui précèdent et qui suivent le tournant du siècle.
Entre 1690 et 1710, en effet, la France, et avec elle une large partie de l'Europe, connaît une détérioration sensible du régime des températures et des précipitations, marquée par un refroidissement important des hivers et par des étés «pourris». L'étude de l'avancée des glaciers dans les vallées alpines aussi bien
que le témoignage des contemporains ont inspiré aux historiens l'expression de «petit âge glaciaire». Sans rien de commun toutefois avec les grandes glaciations préhistoriques, cet abaissement des températures aurait commencé vers 1560 pour ne prendre fin qu'aux environs de 1850. Le creux est atteint entre 1687 et 1700 avec des moyennes inférieures de 1,5 °C à celles de la décennie précédente — soit une différence considérable. Plus terrible encore que celui de 1693-1694, l'hiver de 1709-1710 reste longtemps dans les mémoires : le vin gèle jusque sur la table du roi. Le froid atteint -25 °C en rase campagne et, dans les masures paysannes en torchis, il ne fait guère plus de 0°C. Puis la neige protectrice fond, découvrant la terre nue, qui gèle de nouveau quelques jours après... Néanmoins, il n'y a cette fois «que» 200 000 à 300 000 morts, victimes du froid ou de la faim.

 source: http://www.alertes-meteo.com/

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